Le dessin à la Une de Damien Manuel
Je travaille dans une imprimerie. Pour imprimer un document avec un traceur sur du papier de type instant-dry, je met le mauvais profil d’impression sur la machine, comme si c’était un papier standard.
Normalement lorsqu’on met le mauvais profil, l’imprimante refuse d’imprimer mais l’imprimante imprime quand même.
Le résultat est étonnant, l’encre ne sèche pas immédiatement, elle dégouline et l’image se décompose, se dilue, au cours du séchage. J’utilise ensuite ce procédé pour réaliser une série de photos de dinosaures en plastique.
Puis je quitte l’imprimerie,
et je commence à dessiner. Au début pour un squat, le squat 59 Saint Just qui brûle en juin 2020 ; pour raconter l’histoire du squat, j’utilise ce procédé : je dessine, je scan, je vectorise, des dessins satiriques. Je scan, je vectorise, je retouche si besoin, je poste, tous les jours, presque, ça parle d’actualité, ça parle des inégalités, du climat qui change, de nous, des contradictions du monde ; Je plie de courtes histoires, illustrées, imprimées, sur les mêmes sujets, sur des nuits passées dans les hôtels du 115, sur des oiseaux, sur les vacances ; et je plie encore et je dessine chaque dessin, un par un, en noir pour laisser la place aux couleurs, des carnets de coloriages, toujours sur le même sujet, des frontières, des chemtrails, des médicaments ou des coupes de bois ; je dessine à la main, en noir, une par une des cartes à poster, toujours sur le même sujet, des espèces protégées, des espaces naturels ou un climat d’insécurité.
Je compose, j’oppose, j’imprime, des jeux de différences, reliés, une sélection de dessins quotidiens toujours sur le même sujet.
Et je continue.
Damien Manuel
