à propos de la guerre et des anarchistes
(La meilleure des défenses c’est la fuite)
L’antimilitarisme anarchiste n’est pas qu’une histoire de hiérarchie. Il est simplement une éthique qui ne supporte l’idée qu’il faille tuer qui que ce soit pour avoir raison. La guerre de 2022 en Ukraine est l’occasion de se le rappeler. Par Jide du collectif Bob
Nos gouvernements prêchent la paix. Mais avec leurs conseillers militaires et leurs amis industriels ils encouragent les ventes d’armes, attisent les peurs qui font les gros contrats, volent au secours des dictatures amies, libèrent les puits de pétrole (Jaurès).
Il est surprenant de voir comment l’Histoire peut être redoutable de cynisme. Regardez l’Ukraine, pour ne pas en parler… Souvenez-vous de Nestor Makhno, cet incroyable protagoniste de la Révolution russe… russe ? Mouais, disons plutôt de par là-bas, des grandes plaines de l’est du continent européen. Parce qu’à bien y regarder quoique ce soit de révolutionnaire devrait plutôt être débarrassé des attributs confus des nationalismes. Disons donc un locuteur slave. Anarchiste et paysans. C’est plus cela qui nous interpelle. Un paysans armé révolutionnaire anarchiste.
Cela pose réflexions, car à l’aube du tournant historique qui fût pris dans les années 1917-1920, un million de paysan.ne.s sans terre ukrainien.ne.s non-dirigé.e.s par le général Makno, la makhnovtchina, tinrent tête aux impérialismes en même temps qu’ils/elles refusèrent d’être « livrés » en click and collect par Lénine aux Allemands. Car il fût alors question de cela déjà. 3 mars 1918. Brest-Litosk. La jeune République russe bolchévique signe un traité de paix avec l’Allemagne en pleine première guerre mondiale. Déjà l’Ukraine est dans le deal. En effet, selon les termes du traités et ces riches bassins miniers sont livrés à l’Allemagne. Voilà, un coup de stylos entre képis et gradés, et on lâche les habitants du territoire Ukraine et ses généreuses réserves de blés aux armées d’occupations de l’empire austro-hongrois.
C’est à ce moment-là que s’unissent les armées rouges ukrainiennes, tendance socialiste ainsi que les armées vertes, constitué justement de paysan.ne.s. Victoire sur victoire, puis sur défaites, finalement, cela durera 2 ans, jusqu’à que les soviétiques russes déclarent la makhnovtchina illégale. Quelle est la morale de l’histoire ? C’est que lorsqu’on fait la guerre, on tue les autres avec des armes. Et qu’à ce petit jeu, on est toujours perdant parce que quelqu’une est mort.e .
Monsieur le Président / Je ne veux pas la faire / Je ne suis pas sur terre / Pour tuer des pauvres gens / Ma décision est prise / Je m’en vais déserter (Boris Vian, le déserteur).
Que les impérialistes quel qu’ils soient se moquent des préoccupations des peuples, parce que ce qui les intéressent n’est absolument pas politique mais matériel : des terres pour cultiver, des réserves minières, des ports, des territoires tampons entre deux puissances, et des ressources humaines si nécessaire. Aujourd’hui ne nous trompons pas, l’actuelle guerre en Ukraine, 2022, quasiment un siècle plus tard, n’est absolument pas pour libérer le peuple ukrainien. On se préservera le travail de funambulisme à propos de tenants, des causes et des conséquences de cette guerre. Cela dit, souvenons-nous qu’à l’heure actuelle des combattants d’obédience néo-nazie, le régiment Azov, groupe paramilitaire ukrainien-internationalistes anti-russe depuis la guerre du Donbass en 2014, ont été intégrés depuis à l’armée régulière ukrainienne. Tout le monde en aura enfin entendu parler. Mollement. Souvenons-nous qu’il y a un siècle des paramilitaires paysans anarchistes se faisaient soumettre pour un siècle et plus par les armes plus musclées et plus nombreuses de ceux-celles qu’ils/elles avaient en face.
Souvenons-nous que la meilleure façon de gagner la guerre c’est de faire la paix, de baiser les fusils, les canons, les chars, les avions. De foutre en l’air tout ce qui peut tuer, de désobéir aux ordres des gradés, de désertés, de fraterniser avec le soldat ennemi, qui n’est qu’un ennemi parce que la couleur de son uniforme est différente. De la Commune de Paris aux tranchées de la guerre 14-18 en passant par la révolution des œillets en 1974 au Portugal, les marionnettes que nous sommes, dépouillées de l’autorité militaire, s’affranchissant des ordres de leur hiérarchie, permirent aux idéaux libertaires et émancipateurs de s’exprimer. Pour de courtes périodes, mais on s’en souvient encore aujourd’hui. Cela valait surement le coup. Comme disait Jaurès, « le capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée porte l’orage ». Ce qui revient à dire : désertion générale pour les militaires, par analogie, démission générale pour les travailleurs capitalistes. Ni Dieu. Ni maitre. Ni généraux. Ni guerre.
Vieux monde pourri, tu crèves, vieux monde pourri. Et tu as choisi tes maladies. Nous, c’est la folie, on rêve, nous c’est la folie. On se fait plaisir avec la vie. Notre société, c’est une autre société. Y’a pas de patron, pas d’employé, non. Y’a pas de soldat, pas d’officier non. Y’a pas d’avocat, pas de banquier, non. Qu’il fait bon dans notre société! (Michel Fugain & Le Big Bazar, notre société).
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